Prise de poste : L’enfer des trois mois
Vous venez de prendre un poste depuis un, deux ou trois mois, et votre vie est dure… Vous ne comprenez pas tout, vous avez un milliard de trucs à faire, tout vous prend des heures…et en plus si vous êtes manager, vos équipes attendent déjà beaucoup de vous !
Votre vie oscille entre « ça va passer » et « je ne m’en sortirai jamais », en passant par « ce boulot est-il fait pour moi ? »
Pas de panique, tout est normal ! Et autant vous le dire tout de suite, il n’y a pas de solution magique. Ce qui ne veut pas dire qu’on ne peut rien faire non plus 🙂
Allez, petit plongeon dans « l’enfer des trois mois ».
#1 – Vous n’êtes pas compétent
Dit comme ça c’est un peu sec, mais autant mettre les pieds dans le plat : vous n’êtes pas en maitrise de votre poste. J’entends déjà les objections : « Mais si puisque j’ai eu le poste ! « . Oui, mais non. Parce que qui dit nouveau poste, dit nouvelles connaissances ou compétences nécessaires.
Si vous avez changé d’entreprise au même type de poste, vous savez certes comment faire, mais là vous ne connaissez ni les process, ni les gens, ni l’historique, ni les sujets. Donc même faire un bête truc de logistique peut vous prendre des heures. Alors je ne vous parle même pas d’être efficace ou d’impulser du changement, ce n’est pas le moment.
Et si vous avez un nouveau poste dans la même entreprise, et bien c’est pareil. Parce que même si vous étiez excellent dans le poste précédent, là vous avez des nouvelles compétences à acquérir. Que vous ne savez peut être même pas encore identifier. Et même ce que vous connaissiez change : nouveaux interlocuteurs, nouvelle vision des sujets…
👉 Bref réalisez que vous repartez d’en bas, ça peut alléger la pression…
#2 – Mais vous voyez déjà tout ce qui ne va pas
C’est normal, l’homme est ainsi fait qu’il voit en premier ce qui ne va pas. Pour une question de survie, parce qu’il vaut mieux qu’il voie la baie rouge toxique au milieu du bol que les quarante baies excellentes qui l’entourent.
Et vous êtes pressé de corriger tout ce qui ne va pas. Si vous arrivez d’une autre entreprise vous avez envie d’appliquer tout ce que vous aviez mis en place dans l’ancienne. Et si vous prenez un nouveau poste dans la même entreprise, vous êtes pressé de mettre en place tout ce qui vous manquait avant, parce que maintenant vous pouvez.
Malheureusement, vous n’êtes pas encore en maitrise des sujets, des gens, du cadre de référence… pour décider (cf #1). Ce qui ne veut pas dire ne rien faire. Notez tout ce que vous avez envie de changer quelque part, pour déjà en décharger votre cerveau. Sinon l’idée va revenir toquer à la porte.
👉 Bref, ne changez rien avant trois mois. Observez et notez.
#3 – Et votre équipe attend votre vision et votre cap
Non, vous n’êtes pas un mauvais leader parce que vous ne donnez pas la nouvelle vision au bout de deux semaines. Au contraire, si vous le faisiez, je dirai que c’est limite. Parce que, cf #1, vous n’êtes pas compétent encore.
Alors que vos équipes sont pressées de le savoir. Elles veulent savoir si leur poste, donc leur quotidien, va changer, si vous allez résoudre tous leurs problèmes, où va aller l’équipe… Le changement, c’est anxiogène, et elles savent que les choses vont changer.
Les rassurer en leur disant que rien ne va changer est surement une demi vérité. Par contre, vous pouvez les rassurer en les écoutant, et en explicitant que vous avez bien conscience de leurs attentes mais que vous préférez comprendre avant de décider.
👉 Bref, explicitez cette phase d’écoute.
#4 – Et en plus il faut que vous fassiez vos preuves… et vite
C’est bien gentil tout ça, on monte en compétence, on écoute… Mais votre chef à vous vous demande des résultats, surtout si il vous a embauché pour changer les choses. Et de votre coté vous êtes surement aussi en stress de savoir si vous allez réussir. Vous êtes donc coincé entre le temps nécessaire à la montée en compétences, et les attentes des autres et les vôtres.
On pourrait voir ça comme une injonction contradictoire. Et ça, le cerveau n’aime pas. Au mieux il boucle, au pire il craque. La première étape, c’est de la reconnaitre comme telle. Cela n’empêche pas qu’elle soit la, mais en la nommant on diminue (un peu) son impact.
La deuxième étape, c’est de faire un plan. Parce qu’il faut toujours un plan 😉. Surtout dans l’incertitude. Pas un plan stratégique à 2 ans, mais un plan des 3 mois à venir. Avec votre plan de montée en compétence, avec un peu de tri et de priorisation : quelles sont les thématiques, les gens, les process que vous devez apprendre et dans quel ordre ? Et ajoutez y les premiers sujets (petits) auxquels vous allez vous attaquer, pour avoir quelques succès aussi. Déjà vous ça vous fera du bien d’avoir les idées claires, et si vous l’explicitez à votre chef.fe, cela peut alléger la pression.
👉 Bref, dans l’incertitude, un peu de méthodologie agile, avec un plan à 3 mois et des réussites rapides.
#5 – Et votre énergie n’est pas sans limite
Toute cette période va vous en demander beaucoup, de l’énergie : pour chercher les informations, pour comprendre, pour créer les liens avec les personnes, pour faire vos premiers sujets…. Et votre vie d’à coté ne s’est pas arrêtée pour autant: votre famille, votre vie sociale, votre sport, vos engagements associatifs…même si vous l’avez allégée pour passer le cap.
Dans tous les cas c,’est une période à risque de surchauffe. Quand on y ajoute que c’est aussi un moment de stress sur ses capacités à réussir (si si, ne me dites pas que vous avez confiance à 100% 😉), ça commence à faire beaucoup. Et si on y ajoute que ça ne dure pas trois mois comme on l’avait en tête, mais six, ca vaut le coup de se poser la question de ce qu’on peut faire.
Eh bien vous pouvez prendre le temps de prendre du recul…avec un regard externe. Que ce soit un coach, un ancien collègue ou un conjoint (avec parcimonie 😉), peu importe. Vous n’avez pas besoin de conseils de leur part, mais de quelqu’un qui vous écoute, vous questionne, peut etre vous challenge dans vos attentes… Et ça fait aussi soutien moral, ce qui n’est pas négligeable durant cette période.
👉 Bref, dans cette période prenante, prenez le temps de vous poser avec quelqu’un.
Et au bout de trois mois….
Au bout de trois mois tout s’éclaire…Eh bien non, mais c’est moins pire 😉. Normalement il y a des jours où vous vous dites « oh ca va je ne suis plus sous l’eau », et vous voyez la lumière… pour replonger le lendemain dans le tunnel avec un nouveau sujet que vous ne maitrisez absolument pas. Mes statistiques sur mes coachés me disent que c’est en fait au bout de six mois que ça va mieux.
Au bout de six mois donc, ça va mieux.. mais vous n’avez encore rien fait. Par contre vous êtes suffisamment en maitrise de votre poste et de l’environnement pour vous savoir ce que vous voulez faire. Et là il vous faudra un an au moins pour le faire, voire deux. Parce que le changement, c’est long. Mais ça c’est une autre histoire…